Ancien international burkinabé, finaliste et élu Meilleur joueur de la Coupe d’Afrique des Nations 2013 en Afrique du Sud, Jonathan Pitroipa (37 ans), qui dirige désormais une structure de mangement de sport, « PNP Sport Consulting », avec deux de ses anciens coéquipiers, se trouve présentement en Côte d’Ivoire.
Il estime d’ailleurs que cette 34e édition est certainement l’une des meilleures de l’histoire. Mais, pour les affiches des demi-finales Côte d’Ivoire vs RD Cogo et Nigéria vs Afrique du Sud, ce mercredi, il pense que c’est du 50/50.
Entretien
Quelles sont vos impressions sur cette 34e édition de la Coupe d’Afrique des Nations en Côte d’Ivoire ?
Je crois que la Côte d’Ivoire a démontré qu’en Afrique, on peut bel et bien faire une Coupe d’Afrique extraordinaire. Donc, je dirais que c’est l’une des plus belles CAN qu’on assiste en ce moment en Côte d’Ivoire. Ils ont mis les moyens qu’il faut.
L’organisation, les infrastructures sont au top, les pelouses sont parfaites. Il n’y a pas eu de soucis, sauf le petit bémol lié aux tickets, qui étaient compliqués à l’avoir. Sinon, en tant que joueur, on aurait tous aimé participer à cette CAN.
La Côte d’Ivoire est un pays où il y a la joie de vivre. C’est vraiment la CAN de l’hospitalité, c’est l’une des plus belles CAN qu’ils ont pu organiser. On espère que les CAN à venir seront pareilles parce qu’on a vu que beaucoup de gens se seront intéressés à la CAN parce que c’est la Côte d’Ivoire qui organise. En 2025 ce sera le Maroc, donc c’est une continuité. C’est partie, je pense que la CAN sera plus attractive maintenant.
Vous avez certainement observé les matchs des Étalons du Burkina Faso. Quelle est votre analyse ?
On a montré nos limites parce que lors des matchs de poules on a montré qu’on avait la possibilité d’aller loin. Mais sur d’autres matchs, il y avait moins d’engagement, moins d’envie alors qu’une compétition africaine ça se joue avec le mental. Moi, je dirais qu’on a montré nos limites en huitièmes de finale contre le Mali, parce que techniquement ils étaient supérieurs à nous.
Mais, il nous fallait mettre plus d’engagement et d’envie, montrer que dans le jeux on pouvait mieux faire. Je pense que ce n’est pas regrettable, car çà nous permet de voir nos erreurs et nos limites. On doit se dire maintenant qu’on devrait travailler pour la CAN 2025 parce qu’il y a une équipe jeune.
On a aussi des joueurs qui doivent montrer plus, car aujourd’hui il faut être performant en club avant de prétendre à une sélection nationale, parce que c’est ce qui va permettre d’être plus performant. Je dirais que c’est ce qui nous a un peu joué des tours, parce que nos deux joueurs cadres, comme Bertrand Traoré, sont revenus au moment de la CAN et Dango Ouattara, qui était un peu diminué et qui n’était pas à 100%. Aujourd’hui, il faut qu’on arrive à tirer les leçons et travailler à ce que les prochaines CAN on soit au top.
Pensez-vous que l’équipe burkinabè avait les moyens d’aller jusqu’au bout de cette compétition ?
Je pense que toutes les équipes présentes à cette CAN avaient des chances d’aller au bout. Si vous remarquez, il y a eu des équipes qui se sont montrée comme la Mauritanie, l’Angola et l’Afrique du Sud, qui est bien présente dans le carré d’As. Quoiqu’on avait des limites, si on mettait plus de l’engagement et d’envie et travaillait plus le mental, on pouvait faire mieux.
Aujourd’hui, on a senti quand même que l’équipe avait des limites et il faudrait qu’on travaille plus, pour être plus performant et plus décisif parce que, offensivement, il y avait des lacunes. On n’avait pas un plan de jeu pour pouvoir marquer des buts et des joueurs plus tranchants.
Que pensez-vous des affiches des demi-finales RD Congo vs Côte d’Ivoire et Nigeria vs Afrique du Sud ?
Ces équipes ont montré qu’elles avaient plus envie d’aller jusqu’au bout, à l’image de la Côte d’Ivoire. Après avoir vécu un moment très difficile, elle est repêchée et ça leur a transcendé. Ils sont en train de montrer qu’ils ont des valeurs pour remporter cette CAN.
Aujourd’hui, on a une équipe comme la RD Congo, en demi-finale et ils vont jouer leurs chances à fond. Après, le Nigéria, quand il arrive à cette étape de la compétition, il a toujours tendance à gagner la coupe. Il faut faire attention au Nigéria…
L’Afrique du Sud est une équipe surprise, mais qui a eu très bon jeu avec les joueurs locaux qui ont l’habitude de jouer ensemble et qui ont démontré qu’il y a de la qualité. Tactiquement, ils sont forts et ils ont un très bon gardien. Moi, je pense que tous les deux matchs, c’est du 50/50. Maintenant, celui qui montrera plus d’envie et d’engagement ira jusqu’au bout.
Emerse Fae a certainement surpris son monde après la résurrection de la sélection ivoirienne ?
Je pense que c’était aussi l’opportunité pour lui de montrer qu’il avait des qualités pour coacher cette équipe. Il a eu la chance, c’est sûr. Ce n’est pas donné à tout le monde de pouvoir redresser une équipe après une telle défaite face à la Guinée Équatoriale (0-4). Mais, je pense le fait que lui-même se disait que c’était le moment pour lui de montrer qu’il pouvait avoir les mots pour remotiver les joueurs.
Je pense aussi le fait qu’il a fait appel à son ancien coéquipier Guy Demel, qui est quelqu’un qui avait déjà fait beaucoup d’analyses sur les plateaux de la chaîne Canal+. C’est aussi quelqu’un qui pouvait l’épauler pour remotiver l’équipe.
Je pense que là où ils sont, c’est le fruit de leur travail. À eux de continuer à démonter qu’en Afrique, on peut travailler avec des personnes qui ont déjà donné beaucoup à l’équipe nationale en tant que joueur. C’est une très bonne chose d’avoir vu qu’Emerse Fae puisse amener la Côte d’Ivoire jusqu’en demi-finale. J’espère qu’ils iront en finale.
Les grandes stars africaines n’ont pas vraiment brillé dans cette CAN. Y a t-il une explication ?
Disons honnêtement que la CAN est une compétition très difficile. Déjà, il y a des assesseurs émotionnels, toutes les équipes qui se préparent pour des joueurs moins vus et moins connus, pas des stars, viennent aussi à la CAN pour se faire connaitre. Ce qui fait que le niveau aussi est très relevé et c’est souvent difficile pour une star d’être très performant parce que les autres équipes se préparent en fonction d’eux.
Aujourd’hui, les analyses vidéo sont tellement bien fait qu’on peut travailler de telle sorte pour contrer une star. Ce qui fait qu’aujourd’hui ils ont du mal à être performants.
Vous êtes perdu de vu depuis la fin de votre carrière. Quelle est la nouvelle version Jonathan Pitroipa, après le football ?
Jonathan Pitriopa est toujours là. Je reste toujours dans le milieu du football. Je reste à côté de l’équipe nationale du Burkina. On travaille pour accompagner nos jeunes frères. On a envie de donner plus par rapport à notre expérience, notre vécu, pour pouvoir apporter plus au football burkinabé. Aujourd’hui, on a créé une société avec deux ex-coéquipiers, PNP Sport Consulting, qui travaille dans le management du sport. Donc, on a eu à travailler avec l’équipe nationale pendant la CAN 2021 au Cameroun.
Même si aujourd’hui on n’est pas présent aux côtés d’eux, malgré tout, cela n’empêche pas de travailler dans ce qu’on veut faire. C’est de faire de telle sorte que notre pays puisse atteindre le haut et pourquoi pas remporter une CAN et se qualifier pour la phase finale de la Coupe du Monde.
Je reste toujours dans le milieu du football et par moment on se forme dans le football business. Je suis présent et je suis agent de matchs. Aujourd’hui, on a besoin des personnes comme nous pour accompagner les équipes africaines.